Il n’est pas rare que des particuliers, ayant fait l’acquisition d’un véhicule (notamment d’occasion auprès d’un particulier ou par l’intermédiaire d’un professionnel), découvrent peu de temps après la vente, un dysfonctionnement non apparent au moment de la vente.
Que faire dans une telle situation ?
Sachez que la loi et plus précisément l’article 1641 du Code Civil met à la charge du vendeur une obligation de garantir l’acquéreur des vices cachés du bien vendu (désordres, défauts affectant la chose vendue) et qui rendent ce bien impropre à l’usage auquel on le destine ou diminue cet usage au point que l’acquéreur ne l’aurait pas acheté ou n’aurait consenti à payer qu’un prix moindre, s’il avait eu connaissance de ces défauts.
Cette garantie est due qu’il s’agisse d’un véhicule neuf ou d’occasion et quel que soit le vendeur concerné (professionnel ou particulier).
Conditions de mise en œuvre de la garantie légale des vices cachés
L’action en garantie des vices cachés suppose la réunion de trois conditions cumulatives. Vous devrez apporter :
- la démonstration d’un défaut caché, c’est-à-dire non-apparent et non connu au moment de l’achat,
- Ce défaut doit être antérieur à l’achat (et donc ne pas résulter de l’usure normale du véhicule),
- ce défaut doit rendre le véhicule impropre à l’usage auquel il est destiné, soit en diminuer très fortement son usage.
A titre illustratif, la jurisprudence a pu considérer que :
- la nuisance sonore pour un véhicule haut de gamme et d’une marque de prestige caractérise un vice (Cass. civ. 1, 7 mars 2000, n° 97-17511) ;
- le fait de découvrir après la vente que le véhicule a été gravement accidenté, mais non réparé dans les règles de l’art, justifie la qualification de vice caché (Cass. Civ. 1ère, 25mars 2003, n° 00-21114).
Le vendeur professionnel a une obligation de renseignement à l’égard de l’acheteur concernant notamment l’existence d’un accident survenu sur le véhicule vendu (Cass. Civ. 1, 15 mai 2002, n° 99-21521).
Moyens de preuve et expertise judiciaire
La preuve du caractère défectueux du véhicule se fait par tous moyens (attestations du garagiste, factures de réparation…).
Le moyen de preuve le plus efficace demeure cependant la production d’un rapport d’expertise judiciaire (si, juridiquement, le juge n’est pas lié par le rapport d’expertise, en pratique, il entérine presque systématiquement les conclusions de l’expert).
Pour ce faire, il convient de solliciter en référé la désignation d’un expert judiciaire en assignant le vendeur sur le fondement de l’article 145 du Code de Procédure Civile.
L’expert désigné aura pour mission d’examiner le véhicule litigieux, donner son avis sur l’origine des désordres l’affectant et évaluer les préjudices que vous avez subis.
Délai de prescription
Vous disposez d’un délai de 2 ans à compter de la découverte du défaut pour agir.
Attention, l’action en garantie des vices cachés, même si elle doit être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, est aussi enfermée dans le délai de prescription prévu par l’article L. 110- 4 du Code de Commerce, qui court à compter de la vente initiale.
Deux solutions possibles devant le juge
Une fois le rapport d’expertise déposé et que les conclusions de l’expert judiciaire vous auront permis de déterminer et de dater les malfaçons apparues sur le véhicule litigieux, vous pourrez saisir le juge du fond en ouverture de rapport.
Vous aurez alors le choix de solliciter :
- soit la réduction du prix,
- soit la résolution de la vente, dans cette hypothèse, vous devrez restituer le véhicule et demander le remboursement du prix payé ainsi que des frais occasionnés par la vente.
Conformément aux dispositions de l’article 1645 du Code Civil :
« Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur ».
Ainsi, sous réserve de démontrer que le vendeur avait connaissance du vice, l’acquéreur peut solliciter des dommages et intérêts pour l’ensemble des préjudices subis (frais d’expertise amiable, réparations liées aux vices cachés, préjudice de jouissance…).
La jurisprudence estime que le vendeur professionnel est réputé connaître le bien qu’il vend. Cette présomption irréfragable de connaissance du vice par le professionnel l’empêche de s’exonérer à l’égard de l’acheteur profane et doit aboutir à une condamnation accrue du vendeur conformément à l’article 1645 du Code Civil (Cass. Civ. 1ère 16 avril 1996 n°94-15955).
En outre, la Cour de cassation considère qu’en se livrant de façon habituelle à des opérations d’achat et de revente de véhicule d’occasion dont il tire profit, le vendeur acquière la qualité de vendeur professionnel, de sorte qu’il est réputé connaître les vices de la chose vendue et est tenu de tous les dommages-intérêts envers l’acheteur (Civ. 1ère, 30 septembre 2008, n° 07-16876)
Mesures conservatoires
Il n’est pas exclu, même en présence d’un rapport d’expertise judiciaire sans équivoque, que le vendeur de mauvaise foi conteste les conclusions de l’expert et réfute toute responsabilité.
Vous serez alors exposés à un risque d’insolvabilité frauduleusement organisée par le vendeur (dans l’attente de la décision du juge au fond).
Vous avez dans ce cas la possibilité d’introduire une requête devant le Juge de l’exécution afin d’être autorisé à faire procéder à une saisie conservatoire.
Anne Ndiaye
AMADICE©